mazzasubphoto


Aller au contenu

Menu principal:


Quand l'Hirondelle s'échouait devant la Becque

Libre + Vidéo > Historique les Vapeurs du Leman

Quand l'HIRONDELLE s'échouait devant la Becque
(Le 10 juin 1862)


Histoire qui relate les circonstances exactes de son naufrage par les procès verbaux de l'époque rédigé par le Préfet de Vevey.


Couverture de la brochure, Quand l'HIRONDELLE s'échouait devant la becque. Par Olivier Dedie


Introduction


Monsieur Jean Duchoud qui s'occupa activement du musée du Lac de St. Gingolph durant de nombreuses années, nous a remis un dossier sur le naufrage de l'HIRONDELLE. Cet amateur de souvenirs lacustres a consulté les archives de cette époque, il a retrouvé les rapports décrivant ce grave accident.
Des documents sur l'épave et le site lui ont été fournis par :
Le club de plongée La Palanquée de Clarens,
M. Jean-Claude Tatin, plongeur à Monthey,
M. Pierre Damay, collectionneur à Lausanne,
M. Robert Thiebaud, pilote du sous-marin F.A Forel,
M. Claude Millason à Montreux.
Les articles de journaux des dernières décennies et ces renseignements de différents sources, nous ont permis de retrouver le déroulement détaillé et complet de ce sinistre.
Parallèlement à la rédaction de cette histoire, nous avons construit un modèle réduit au trentième de L' HIRONDELLE qui sera exposé au Musée de St-Gingolph. Nous avons eu l'intuition que le plan initial du bateau (12) avait déjà été modifié à la construction. Pour créer cet objet avec une certitude, les photographies sous-marines de Daniel Mazza, prises avec les risques que l'on sait, nous ont été très utiles ; les plus caractéristiques illustrent le texte. Ce photographe sous-marin se fait une spécialité de répertorier les sites de plongée accessibles : Lacs de plaine et de montagne, ainsi que les rivières ; nous remercions pour sa collaboration.
Dans une deuxième partie, nous analysons les accidents des premiers bateaux à roues qui se sont produits sur le Léman et en Grande-Bretagne ; Ils étaient souvent dus à la timonerie située à la poupe, vestige de la marine à voiles.

-1-


Révolution dans les transports

Dès 1824, les bateaux à vapeur ont révolutionné le déplacement des voyageurs sur les rives du lac Léman ; ils ont rapidement porté tort à exploitation des hôtels que les relais routiers avaient rendu prospères.
Dès l'apparition des chemins de fer on envisagea de ne relier provisoirement que les lacs suisses par le train. Devant le succès de ce moyen de locomotion, on ne tarda pas à étendre son réseau.
Dans le bassin lémanique, les lignes de chemin de fer côté suisse ont été mises en service aux dates suivantes :
1856 Morges-Bussigny-Yverdon-Lausanne.
1856 Genève- Coppet.
1857 Villeneuve-Bex.
1858 Coppet-Morges & Lyon-Genève.
1859 Bouveret-Martigny.
1860 Bex-St.Maurice.
1859-1861 Desserte ferroviaire du port de Morges.
1861 Lausanne-Villeneuve.
1862 Lausanne-Berne.
La double voie a été mise en service de Genève à Gland et d'Allaman à Renens en 1868, de Gland à Allaman et de Renens à Lausanne en 1872 ; la ligne à voie simple de Bellegarde à Bouveret terminée en 1886 ne pouvait être que secondaire.
Le transport des voyageurs et des marchandises entre les différents terminus provisoires des voies ferrées fut un aubaine pour les bateaux à vapeur. On compléta la flotte du Léman en construisant l'HIRONDELLE et le RHONE en 1855 et modernisant l'ancien AIGLE en 1857. Les deux premiers de ces bateaux ont réapparu dans l'actualité après la découvertes de leur épave, en 1966 celle de l'HIRONDELLE (6) et en 1984 (16) celle du RHONE.
Les techniques de la plongée, l'échosondeurs et la caméra sous-marine ont permis ces performances.



-2-


L'HIRONDELLE fut lancé à Ouchy le 27 août 1855. Il commença son service à la fin septembre 1856. Les passagers étaient exposés aux intempéries sur le pont ras, sauf à passer sous le pont, dans des locaux de refuge très bas de plafond. Il n y avait pas mieux à offrir que ce que l'on trouvait dans les petit wagons primitifs des trains des chemins de fer. Néanmoins, les " Guides du voyageur " recommandaient à leur clientèle de prendre le bateau plutôt que le train quand il fait beau temps et que l'on " parcourt le pays pour la première fois " (9). On qualifiait le maniement de ce navire de " doux et tranquille ". Il s'échoua une première fois à Promenthoux, ce qui nécessita une opération importante de renflouement.
Nous avons découvert aux archives de Rolle un bulletin de radelage adressé à l'HIRONDELLE pour le mois de septembre 1858. Ce vapeur avait débarqué et embarqué à Rolle 1365 passagers à 8 cts. Le Bulletin est déjà signé : Hoffmann capitaine ! Un autre bulletin de radelage est adressé à l'AIGLE pour août 1858.
Le " pont en bois " de Rolle le débarcadère a été construit en 1857. Ces bulletins de radelage nous font envisager deux éventualités : ou bien le débarcadère n'était pas terminé en septembre 1858, ou il aurait été réservé aux seuls bateaux de la compagnie des deux RHONE. (18)


Bulletin de radelade pour la commune de Rolle.

-3-


Le naufrage de l'Hirondelle


Le Récit le plus fidèle et le plus détaillé de ce sinistre est contenu dans les rapports et comptes rendus adressés au Conseil d'Etat les 10, 11, et 20 juin 1862 (2a) (2b) et (2c) par le préfet de Vevey Jean Jacob Roche. Nous les reproduisons intégralement.


Premier rapport (2a)

" Au Conseil d'Etat,

" Depuis la dépêche que j'ai eu l'honneur d'adresser hier à Monsieur le Conseiller Duplan, il n'y a aucun changement à l'état du vapeur l'HIRONDELLE, ce navire est au trois quarts sous l'eau, l'avant plongeant et l'arrière en l'air, comme cloué sur un récif et ayant fortement perdu son l'équilibre.

" On ne connaît pas encore toute l'étendue du mal, car il est impossible d'arriver à la voie d'eau qui paraît se trouver dessous la machine.

" Jusqu'à maintenant on a fait de vains efforts pour relever le navire, je crois que nous avons pas ici des engins assez puissants pour cela.

" Les membres de l'administration espèrent beaucoup dans le savoir de l'ingénieur zurichois qui à relevé il y a 2 ans le LEMAN échoué devant Coppet. Cet ingénieur vient d'arriver, accompagné de Messieurs Gottefrey et de la Harpe. Je tâcherai de suivre les travaux autant du moins que mes occupations et la distance me le permettront pour vous tenir au courant.

" La cause de se sinistre est évidemment dans l'imprécision du timonier qui ne connaît pas cette partie du lac ; par une triste fatalité deux matelots malades ont dû être remplacés par deux suppléants et l'un d'eux était au gouvernail lors de l'accident. Il ignorait sans doute l'existence des rochers qui se trouvent à fleur d'eau devant la pointe de Peilz ; aussi voyant venir une barque dans la direction opposée et sans tenir compte des signaux des bateliers et leurs cris " passez au large ", il lança son navire entre la barque et le rivage et se trouva pris " sur les récifs "

" La faute est autant plus grave que la barque marchait à l'étire, ce qui démontrait que le lac manquait de force. Le Capitaine était occupé à délivrer près de 300 billets pour Montreux et Clarens (c'était le jour et l'heure où les habitants de cette contrée revenaient du marché). Le pilote avait aussi beaucoup à faire pour la même raison, causes pour lesquelles une surveillance suffisante n'a pu être exercée.

" Il est heureux qu'on n'ait eu à déplorer aucun accident car le bateau était fortement chargé, mais on a pu transborder sur une barque tous les passagers, marchandises et mobilier avant que le navire s'enfonçât. Je crains qu'il ne se passe bien du temps avant que ce navire ait pu être remis à flot, il me semble bien difficile de le retirer entier.
Signé Préfet Jean Jacob Roche (1852-1869).


-4-


L'Hirondelle quitte Genève . Photo tiré du livre Bateau à Vapeur du Léman, Edition de Fontainemore, 1976.

Deuxième rapport (2b)


" A Monsieur le Conseiller d'Etat,

" Ce n'est que hier 19, que j'ai reçu votre honoré du 16/17 juin me demandant un rapport circonstancié sur le sinistre arrivé à l'HIRONDELLE le mardi 10 juin 1862. Pour me conformer à vos désirs, j'ai fait appeler le capitaine et le pilote du navire, et j'ai l'honneur de vous transmettre le résumé de leurs déclarations, qui au reste sont conformes aux renseignements qui me sont parvenus de divers côtés.

" Le Capitaine Hoffmann (en septembre 1858, il commandait déjà l'HIRONDELLE) déclare que le 10 juin le bateau à vapeur a embarqué à Vevey pour Clarens et Montreux de 180 à 200 passagers, qui joints é ceux qui était déjà à bord, venant de plus loin, portait le nombre total à 350 environ. Le temps était beau, aussitôt après le départ de Vevey, le capitaine parcourait le navire pour engager les passagers à aller prendre leurs billets à la cabine où un des quatre employés du bateau les distribuait, un second employé était au gouvernail, et les deux autres, pilote compris, s'occupaient à ranger les bagages sur le pont qui était encombré par les panier, hottes, corbeilles des passagères de Clarens et de Montreux revenant du marché de Vevey.

" Le capitaine ne pouvait avoir aucun doute sur la capacité du timonier Visinand, car cet homme remplaçait un matelot ordinaire malade ; il avait été accepté par le capitaine sur la recommandation du malade, le vieux Perrey dit le Zèbre. Visinand avait été pendant un à deux ans sur le LEMAN puis ensuite sur des barques, il devait bien connaître le lac.

" Arrivé près de la pointe de Peilz, une barque venait du sens contraire, serrant le rivage et marchant à l'étire, fait qui ne pouvait échapper au timonier, malgré cela, celui-ci voulu s'engager entre la barque et la rive et jeta son navire sir les récifs à fleur d'eau. Toute la faute est à ce timonier qui dans cette circonstance s'est conduit comme un enfant ne l'aurai pas fait. Le capitaine ajoute qu'il est d'habitude que le matelot qui est au timon à l'arrivée dans un port, reste à son poste jusqu'à ce que le pilote soit descendu de son banc de quart et ait aidé à ranger les bagages, c'est ce qui a eu lieu le 10 juin comme l'ordinaire.

" Immédiatement après l'accident, la barque cause innocente de ce malheur s'est rapprochée et les passagers y sont presque tous montés et ont été conduits à la Tour-de-Peilz; quelques uns étaient descendus dans des petits bateaux. Après les passagers on a eu le temps de débarrasser le vapeur de tout son mobilier, tables, tapis, glaces, etc…

" Une heure et demie après le choc sur les récifs, le bateau s'enfonçait. Aucun accident n'est arrivé aux personnes car le capitaine avait eu le soin de faire passer tous les passagers sur l'arrière du bâtiment reposant sur le roc. Pendant le sauvetage il a été perdu un sac de nuit, mais son propriétaire a reconnu que c'était de sa faute. On a volé un tonneau de vin et un jambon, plus une jumelle marine appartenant au capitaine. Celui-ci a terminé ses explications en déclarant que ni au moment du sinistre, ni depuis, il ne s'est élevé aucune plainte contre lui et la conduite de l'équipage. Il a au contraire reçu des témoignages de satisfaction. Enfin il invoque les témoignages de Messieurs Chausson notaire à Noville et Albert Gétaz qui étaient sur le bateau au moment du sinistre, il désirait que Madame Chaboret, maîtresse de pension à Genève fut entendue, c'est cette dame qui était sur le bateau avec douze demoiselles de pensionnat.

" Le pilote Borgognon François donne les mêmes détails que M. Hoffmann. Et dit que le mardi il y a toujours beaucoup de monde sur le bateau et surtout beaucoup de bagages depuis Vevey Montreux. Comme ils ne sont que 4 employés, l'un est au gouvernail, un second distribue les billets, et les deux autres doivent s'occuper des bagages. C'est ce qu'il faisait le 10 juin 1862 après être descendu de son banc de quart.

" Chacun croyait que Visinand connaissait son métier, il avait été pendant deux ans sur le bateau à vapeur le LEMAN, puis ensuite sur la barque la CONSTANCE et enfin sur le MERCURE. Quand la barque a été rencontrée, elle allait à l'étire, ce que le timonier à dû nécessairement voir. Lorsque le bateau a touché il y a eu deux secousses, il s'est arrêté à la seconde et il est resté immobile pendant une heure et demie, au bout de ce terme, l'avant s'est rempli d'eau et a sombré, mais auparavant tous les passagers et le mobilier étaient sauvés et en sureté. En résumé le pilote met toute la faute sur Visinand qui est parti le lendemain et n'a pas rapproché l'HIRONDELLE, car il serait, dit il " arrivé malheur ".

" Voilà, Monsieur le Conseiller d'Etat, tous les renseignements que je peux vous donner et que j'ai lieu de croire exacts. Cela est si vrai que personne n'a pensé à porter plainte à l'autorité judiciaire, personne n'ayant éprouvé un dommage réel, à l'exception d'une émotion bien naturelle mais heureusement de courte durée.

" Il est nécessaire de bien se rendre compte des fonctions des employés du bateau l'HIRONDELLE, le capitaine est l'officier comptable et actuellement, il a de plus haute surveillance du bateau. Quand à la manœuvre, c'est l'affaire du pilote, et celui-ci venait précisément de descendre du banc de quart, ne voyant aucun danger et ne se doutant nullement que son timonier allait faire la faute grave qui a détruit le bâtiment. C'est au reste l'opinion générale.

" J'aurais bien voulu entendre le timonier Visinand, et même mon intention était de le faire arrêter, mais il a disparu il y a quelques jours après avoir rendu son équipement militaire, on l'a vu à Genève récemment et manifestant la résolution de prendre du service ; il serait peut-être convenable de le faire rechercher dans cette ville.

" Veuillez Monsieur le Conseiller d'Etat, agréer l'assurance de ma considération distinguée.
Signé Le Préfet Jean Jacob Roche.

-5-


La copie originale c'est de là que tout est parti ! Collection Daniel Mazza.

Troisième rapport (2c)

"
Monsieur le conseiller d'Etat,

" Pour me conformer à l'invitation que vous m'avez adressée d'entendre quelques personnes qui se trouvaient à bord de l'HIRONDELLE lors du sinistre, J'ai écris aux citoyens ci-après en les priant de passer dans mon bureau mardi le 1er juillet 1862 (jour du marché de Vevey) pour me donner les renseignements qu'ils pourront sur les causes de cet accident.

" Messieurs Gétaz Albert, Chausson notaire Favrod allié Druey à Villeneuve, Buenzod Docteur à Montreux, Picary et Rochat Charles. De plus j'ai écris à Madame Chaboret , maîtresse de pension à Genève, qui se trouvait sur le navire avec ses élèves.

" M. Rochat me répond par écris qu'au moment de l'accident il se trouvait dans le salon de secondes, et ce n'est qu'en montant précipitamment sur le pont qu'il s'est aperçu de l'endroit où était le bateau. Il déclare qu'au moment de l'accident, le capitaine invitait les passagers à prendre leurs billets au bureau, vu les nombreux voyageurs montés à bord à Vevey. Il se loue de la conduite de l'équipage pendant tout le sauvetage.

" M. Chausson était dans la chambre des secondes au moment de l'accident, il s'est hâté de monter sur le pont, mais il ne peut indiquer comment le sinistre est arrivé, il a bien entendu dire que c'était la faute du pilote, mais il ne peut expliquer si on entendait parler du pilote proprement dit ou du timonier. M. Chausson se loue beaucoup de la conduite du capitaine, de son sang-froid et de sa présence dans cette circonstance, d'autant plus que les femmes, surtout, criaient beaucoup, et notamment une valaisanne, femme du desservant de l'Hôtel de la tour au Bouveret.

" M. Buenzod Docteur était dans l'intérieur du bâtiment quand le bateau a été arrêté sur les récifs avec un bruit ressemblant au tonnerre. Le capitaine dans ce moment-là était descendu pour inviter les passagers à prendre leurs billets, quand M. Buenzod a eu quitté le bateau, il a été convaincu que l'accident était dû à la faute du timonier et nullement aux autres employés.

" M. Favrod dit que le pilote doit se tenir sur son banc de quart au départ d'un port, il n'en descend que quand il est assuré sur la bonne direction du navire, c'est ce qui a eu lieu. Le navire a été lancé entre le rivage et une barque naviguant à l'étire, le timonier devait nécessairement la voire et passer en " nan ", c'est-à-dire en plein lac ; ne l'ayant pas fait, il a été la cause du malheur. Un employé délivrait les billets, le pilote désencombrait le pont et le capitaine engageait les passagers à prendre leurs billets, aucune faute ne peut leur être imputée. Le déposant ajoute qu'on dit que le timonier Visinand a dû être renvoyé du LEMAN, et même que le pilote de l'HIRONDELLE l'avait blâmé quelques jours auparavant pour sa négligence ; après le choc le timonier n'avait nullement l'air ému, il était assis près du gouvernail et ne pressait pas du tout pour aller sur le pont.

" M. Gétaz Albert dépose comme toutes les personnes précédemment entendues, il ajoute que le pilote Borgognon est un bon batelier et entendu dans son métier, il venait de descendre de son banc quand le bateau a touché et il a immédiatement donné l'ordre d'arrêter la machine. Le témoin croit que le timonier s'est trompé en tournant la roue du gouvernail, surtout dans la précipitation, cela s'est vu quelques fois, dit-il, et chez des bateliers habiles. Néanmoins il ne l'excuse pas et déclare que c'est Visinand seul qu'est dû le sinistre. Il paraît que celui-ci avait dû être rappelé à l'ordre pour sa négligence. Le capitaine et le pilote ne doivent encourir aucun blâme, car ils faisaient leur service.

" Ce rapport qui fait suite à celui que j'ai l'honneur d'adresser au département de Justice et Police le 20 juin dernier, renferme tout ce que j'ai ou apprendre sur cet accident tout fortuit. Le fait que le timonier était distrait par deux femmes qui lui causaient, n'a pas pu être démontré, c'est un bruit qui a couru sans que j'aie pu remonter à sa source. J'ai la certitude que s'il se fait une enquête pénale sur cette affaire, elle aboutira à convaincre que l'accident est dû à la négligence et à imprudence du timonier Visinand, et ne peut nullement être attribuée soit au capitaine, soit au pilote Borgognon. Au surplus, ce qui démontre encore la culpabilité de Visinand, c'est qu'il a disparu le lendemain de l'accident, il doit être encore à Genève.

" Veuillez, Monsieur le Conseiller d'Etat, agréer l'assurance de ma considération très distinguée. Sceau de la préfecture de Vevey, le Préfet Roche Vevey, le 2 juillet 1862.

" Au moment d'expédier ce rapport, je reçois de Madame Chaboret, maîtresse de pension à Genève, une lettre qui, quoique ne donnant pas de nouveau détails sur l'accident, loue beaucoup la conduite du capitaine et des employés du bateau.

-6-

*************


Horaire du dernier voyage de l'Hirondelle, le 10 juin 1862. Bateau à Vapeur du Léman, Edition de fontainemore, 1976.

Réflexion personnel de l'auteur à ces 3 rapports rédigés intégralement par le Préfet de Vevey Jean Jacob Roche pour le Conseiller d'Etat.


On peut faire certains commentaires sur ces rapports du naufrage de l'HIRONDELLE. Avant l'échouement le timonier est à la barre placée à l'arrière du bateau, son champ de vision est d'autant plus restreint que 180 à 200 voyageurs montés à Vevey déambulent devant lui sur le pont pour aller prendre leur billet ; le pilote, descendu de son banc de quart (Passerelle ?) s'occupe des bagages ! Ce dernier n'étant plus en mesure de donner rapidement des ordres au timonier, ni au mécanicien. Visinand simple batelier du lac s'embauchant sur les barques à voiles ou sur les bateaux à vapeur comme marinier a véritablement été pris pour un bouc émissaire !!

L'horaire que suivait l'HIRONDELLE datait du 1er juin 1862 (9 jours avant l'accident), le bateau quittait Vevey à 12 heures et devait arriver à Clarens-Montreux à 12h15 (voir horaire Bateau à vapeur sur le lac Léman). Il est intéressant de consulter l'indicateur de la CGN du 1er mai 1906 : Vevey 11h25, Clarens 11h 40, Montreux 11h45. Cet horaire devait être tenu par des bateaux plus performants, toute confusion était évitée dans les manœuvres ; il n'y a plus de pilote ; le timonier placé au centre du bâtiment gouverne seul et donne directement les ordres à la machine par le tuyau acoustique ou le chadburn.

-7-


On tente de renflouer L'HIRONDELLE


M. Beat Arnold, Archéologue à Neuchâtel nous donne la description la plus intéressante des travaux de sauvetage, nous transcrivons son article paru dans AQUATICA octobre 1970.

" Le lendemain, les travaux de sauvetage commencèrent à s'organiser et même un associé de la maison Escher, Wyss & Cie à Zurich, qui avait construit le bâtiment, vint diriger les travaux. On commença par mettre à l'avant des sapins couchés transversalement, puis les chaînes furent placées sous la carène. Avec des crics on espéra relever centimètre par centimètre et le mener dans un port du voisinage.

" Cependant de graves déformations de la coque se laissaient voir, et le fait que les plus graves d'entres elles se trouvaient sous les chaudières ne facilitaient guère le sauvetage. On restait ainsi, encore fort septique quand au renflouage du bateau. Pourtant quinze jours après l'accident, le vapeur avait été relevé de deux mètres, et l'on commençait, très sérieusement à envisager le succès total de l'opération.

" Hélas, dans la nuit du samedi 13 juillet 1862 au dimanche 14, une tempête violente se leva sur le lac et le navire rompant ses câbles et brisant les barques d'appui, vit les trente hommes, n'attendant que le lendemain pour le ramener au port. L'abandonner au petit matin on ne voyait plus émerger que les bordages et les portemanteaux de l'arrière. Les pompes ayant été englouties avec le vapeur, les opérations de sauvetage s'annonçaient des plus difficiles. Et le mercredi 29 juillet 1862, après qu'on eut récupéré la poupe qui s'était détachée du navire, le reste du bâtiment, soit la proue et les machines disparurent pour toujours dans les flots.

" Notons encore que sept années plus tard, un scaphandrier tenta vainement, pendant sept jours de retrouver l'épave.


La figure de proue, les premières photos prise en 1970 par Beat Arnold. Feuille d'avis de Lausanne le 3 février 1970.

-8-


Découverte de l'épave de L'HIRONDELLE


C'est le 27 février 1966 que quatre plongeurs du centre de sport sous-marin de Lausanne, Claude Lang, Dominique Arman, André Piguet et Claude Schmidt découvrent fortuitement l'épave qui gît sur un fond incliné, l'avant reposant par 42 mètres alors que la poupe descend à 58 mètres.

Les premières photographies de l'épave ont été prises par beat Arnold les 30 décembre et 2 janvier 1970, accompagné de quatre compagnons Claude Lang, José Carlen, Jean-Jacques Mulhauser et François Francillon. Elles ont publiées dans la feuille d'avis de la Lausanne. (6).Cet article reproduit en particulier la photo de la figure de proue à laquelle s'est accroché un filet de pêcheur, tout en bois sculpté représentant la croix fédérale. Cette pièce semble être une des parties du bateau la plus intéressante à voir.

Selon l'article d'Alain Walter paru dans le MATIN du 29 décembre 1999 (24), cet écusson aurait disparut, cassé par un plongeur ; de nombreuses pièces intéressante de l'épave ont été prélevées à titre de trophée ! L'HIRONDELLE gît actuellement entre 42 et 58 mètres de fond.

Pour augmenter la solidité des tous premiers bateaux à vapeur en bois, on n'avait pas tardé de les doubler d'une coque en fer. Pour l'HIRONDELLE, le plan d'Echer Wyss prévoyait un bâtiment entièrement en fer. Mais comme en 1855 il n'y avait pas encore de chemin de fer pour amener en Suisse des matières pondéreuses comme le fer, on peut se demander si des modifications ne sont pas intervenues dans la structure du navire.

Seules des photographies sous-marines de l'épave pouvaient nous renseigner. Beat Arnold a été le premier à prendre de bonnes photos. (7) Ensuite Jacques Piccard a pris des photos intéressantes de l'épave depuis le sous-marin F.A Forel le 13 août 1993.
Avant que l'épave soit de plus en plus disloquée par les plongeurs en passe de dépouille souvenirs, Daniel Mazza a pris d'excellentes photos donnant la forme des hublots, des cabines, des superstructures en bois et de certains agrès.

Olivier Dedie à coté de sa maquette de l'Hirondelle et l'auteur du livre Quand l'HIRONDELLE s'échouait devant la becque. Photo prise en mars 2000 à Rolle. Photo Daniel Mazza

-9-


Confection d'un model réduit à 1/30


L'HIRONDELLE est le premier bateau à vapeur entièrement construit par la maison Echer Wyss pour le lac Léman.

Ses caractéristiques sont les suivantes : Page 5.

Ce sont les cotes et les plans de M : Erich Liechti qui nous on permit de construire une maquette au trentième de l'HIRONDELLE. D'après ces données, le bâtiment devait être entièrement en fer.

Nous sommes posés la question suivante : en 1855, la construction métallique était inexistante dans notre pays ; dans quelle mesure certaines structures ont-elles été remplacées par du bois ? Sur ce point seule l'épave pouvait nous renseigner. C'est grâce aux photos sous-marines que nous avons pu constater de telles modifications, par exemple, le bastingage prévu en tôle, devient une simple barrière en bois, les cabines sur le pont sont complètement en bois et les fenêtres ont la forme de hublot ovales. La roue de la timonerie n'a pas été retrouvée était probablement semblable à celle du RHONE. N'exerçant pas l'art de la mécanique, nous avons confectionné sur le modèle réduit un système plus simple qui place le timonier derrière la roue ; les puristes ne nous en voudront pas !

Pour le choix du mobilier du pont, nous nous sommes inspirés d'un dessin de Christian W. Allers de 1889.

-10-


BIBLIOGRAPHIE


(2a) Lettre Préfet Roche au Conseiller d'Etat le 11 juin 1862.

(2b) Réponse Préfet Roche au Conseiller d'Etat Victor Ruffy le 20 juin 1862.

(2c) Rapport demandé au Méd. Buenzod par le Préfet à l'intention du département des travaux publiques le 2 juillet 1862.

(4) Feuille d'avis de Lausanne 5 décembre 1968.

(5) Horaire de la CGN du 1er mai au 30 septembre 1906.

(6) Claude Provost, L'HIRONDELLE coula il y a 108 ans, Feuille d'avis de Lausanne, 3
février 1970.
(7) Beat Arnold, Texte & photo AQUATICA, octobre 1970.

(8) Histoire imagée les grand bateaux du Léman, Edouard Meystre, 1970.

(9) Bateaux à vapeur du Léman, Meystre & Bernard, 1976.

(10) Ce piège mortel, Article 24 heures le 25 octobre 1977.

(12) Schiffahrt auf dem Genfersee, Meister, Gwerd & Riecht, 1977.

(16) O.H. 300 mètres sous l'eau, Le MATIN du 14 Août 1984.

(17) Alain Walter, les bulles de l'HIRONDELLE, le 6 juillet 1988.

(24) Alain Walter, le secret des plongeurs de l'HIRONDELLE engloutie, Le MATIN du 29 décembre 1999.


Texte de Olivier Dedie, Société d'histoire de la cote, Quand l'HIRONDELLE s'échouait devant la Becque. Rolle avril 2000.

Hirondelle Hiver 2000. Nikon F90x + objectif 20mm f2.8 D. Caisson Ikelite + flash. Film diapositives fuji provia 100F et sensia 100. Photo Daniel Mazza

Poster épave de l'Hirondelle façon pêle-mêle.


Poster de Gauche fait pour l'exposition de la Fondation Bolle de Morges.

Les posters qui suivent sont fait pour l'exposition Atelier-Galerie O'Local de Estavayer-le-Lac.

Présentation panoramique de l'épave de l'hirondelle à l'occasion de l'exposition de la Fondation Bolle à Morges.

Page d'accueil | MAJ + Liens | Sub Photo | Rando + Sub | Libre + Vidéo | Sport-Loisir | Plan du site


Sous-menu


Mis à jour le 05 juin 2017 | mazzasubphoto@bluewin.ch

Retourner au contenu | Retourner au menu